Note d’après l’article de Charlotte Mason Poetry par Art Middlekauff (ajout de Charlotte Mason France en gras) : Dans son dernier volume, Towards a Philosophy of Education, Charlotte Mason résume le travail sur la nature assigné aux enfants de la Forme II :

« On attend d’eux qu’ils réalisent beaucoup de travail à l’extérieur et ils sont aidés par The Changing Year, d’admirables études mensuelles sur ce qu’on peut voir à l’extérieur. Ils tiennent des registres et des dessins dans un carnet de notes sur la Nature et font des études spéciales pour la saison en cours, avec des dessins et des notes. » (p. 219)

L’appui de Mason au livre The Changing Year se reflète dans les programmes du PNEU depuis au moins 1921 et jusqu’en 1930. Le livre n’est pas seulement recommandé pour la Form II, mais il est également mentionné dans les programmes des Form I, III et IV. Par exemple, dans la Forme IV du programme 90 (1921), on peut lire :

« Tenez un carnet de la Nature (P.N.E.U. Office, uni ou interfolié, 4/6), avec des listes de fleurs et d’oiseaux, et prenez des notes quotidiennes. Pour le travail à l’extérieur, faites une étude spéciale. The Changing Year, par F.M. Haines (Wadsworth, 3/-), ou Countryside Rambles, par W.S. Furneaux (Phillip, 2/6) : d’avril à juillet, ou A Nature Study Guide de Furneaux (Longmans, 6/-). »

Le contenu de The Changing Year est toutefois antérieur aux programmes de 1921. Dans la préface du livre, l’auteure Florence M. Haines explique :

« Ces documents sont initialement parus dans The Parents’ Review en 1916 sous la forme d’une série de promenades mensuelles. »

L’équipe de Charlotte Mason Poetry a récemment reçu un scan de la troisième édition de The Changing Year qui a été publiée en 1924. Compte tenu de la place importante qu’occupe cet ouvrage dans les programmes et la littérature du PNEU, nous avons pensé qu’il valait la peine de le faire revivre en 2020. L’équipe de Charlotte Mason France, ayant le même avis, a également pensé qu’il valait la peine d’être découvert en francais en 2022. Nous proposons de vous emmener chaque mois en promenade avec F. M. Haines, et de vous donner l’occasion de réfléchir à ce que Mlle Mason avait en tête lorsqu’elle parlait de « faire une étude spéciale ».

Haines était une ardente naturaliste qui contribuait fréquemment à la rédaction d’articles et de lettres pour The Parents’ Review. Il est intéressant de noter qu’elle “croyait ardemment au système éducatif de Froebel”. Elle a été un peu perturbée de lire dans The Parents’ Review d’août 1908 que le PNEU était « enclin à penser que l’enseignement de Pestalozzi et de Froebel ne reconnaît pas suffisamment l’individualité des enfants » (p. 609). Dans une lettre au rédacteur en chef publiée le mois suivant, Haines s’y oppose :

« Froebel a été, je crois, le premier éducateur à reconnaître l’individualité de l’enfant, et c’est l’une des clés de voûte du système des jardins d’enfants. (p. 720) »

Heureusement pour nous, Mlle Mason a dépassé cette querelle sur la question de savoir qui était le réformateur le plus progressiste en matière d’éducation, pour se concentrer sur le premier amour de Haines : la Nature. Janvier peut sembler être un mois étrange pour commencer une série sur l’étude de la Nature. J’aurais pu le penser moi-même. Mais j’ai lu l’article de Haines intitulé « Une promenade en janvier », et cela m’a rappelé combien il y a de choses à voir et à entendre à cette époque de l’année. Plus qu’assez, en effet, pour faire une étude spéciale. Plus qu’assez pour tenir un carnet de la Nature, également.

Par Florence M. Haines
La nature au fil de l’année, pp. 1-8

« Puis vint le vieux Janvier, bien enveloppé
Dans de nombreuses herbes pour se protéger du froid ;
Pourtant, il tremblait et frémissait comme pour se calmer.

Il souffla pour réchauffer le bout de ses doigts ;
Car ils étaient engourdis d’avoir tenu toute la journée
Une hachette avec laquelle il abattait du bois.

Il coupait les branches inutiles des arbres :
Se tenant debout sur un énorme pot en terre cuite,
Duquel la grande bouche faisait jaillir le déluge d’Ogygès. »

Spenser.

Spencer, dans les Mutabilitie Cantos de sa Reine des fées [Titre du long poème d’Edmund Spencer], dépeint chaque mois avec son outil agricole et son signe zodiacal : Janvier se présente donc à nous avec sa hachette comme « l’homme portant une cruche » [Marc 14:13], ou « répandant l’eau », selon une autre version. Les « nombreuses herbes » qui l’enveloppent – le mot survit encore chez nous dans l’expression “mauvaises herbes” – sont impuissantes à protéger ses vieilles mains engourdies, car le froid est la caractéristique dominante de Janvier. Maintenant, encore plus qu’à la période de Noël,

« Vole férocement
Le souffle du Nord et de l’Est, et la glace
Crée des poignards sur les auvents acérés. »

« Janvier sec et sage, est un bon présage. » est un proverbe familier, sous diverses formes, dans la plupart des pays d’Europe, tout comme un janvier sauvage est considéré comme une infortune.

« Janvier frileux, 
gèle l’oiseau sur ses œufs. ».

alors que nous savons que

« Janvier amasse les souches, 
février les brûle toutes. »

Une autre rime dit que

“Il vaut mieux voir un voleur dans son grenier 
qu’un laboureur en chemise en janvier.”

Alors que, enveloppés, comme le mois de Janvier, dans de « nombreuses herbes », nous sortons vivement dans l’air frais, le paysage de janvier apparaît encore plus hivernal que celui de décembre, « les branches plumées de neige » ou mornes et nues sur un ciel gris ou bleu pâle, les ruisseaux silencieux sous leurs couvertures glacées. Une couverture glacée qui est précieuse pour maintenir la température de l’eau en dessous, où les poissons se déplacent lentement, et les grenouilles, les tritons et les anguilles sont en sécurité dans la boue au fond, hibernant jusqu’à des jours plus chauds. Nous surprenons peut-être un lapin qui s’est aventuré à grignoter un peu d’écorce. Les lièvres aussi, car selon M. E. K. Robinson, « les journées ensoleillées de début janvier donnent toujours une impulsion aux ébats amoureux des lièvres. Toute leur parade nuptiale est comique, mais le plus drôle, c’est lorsque deux d’entre eux broutent tranquillement à quelques mètres l’un de l’autre, et que soudain l’heureuse pensée que le printemps arrive semble frapper le mâle, qui sans aucun avertissement se jette haut dans les airs, et reprend son repas. Après un intervalle de quelques secondes, il recommence, jusqu’à ce qu’une de ces impulsions inexplicables, auxquelles les lièvres sont soumis, saisisse sa femme, qu’elle parte à toute allure, et qu’il la suive. Après avoir couru une centaine de mètres, ils s’arrêtent soudainement et poursuivent leur repas, agrémenté, comme précédemment, des es acrobaties intermittentes du mari. Il ne se contente pas de « sauter » comme le ferait un chien, il est projeté en l’air comme par une catapulte, et retombe comme un lièvre mort, parfois même sur le dos. C’est une performance étonnante ; mais vous pouvez voir des lapins impassibles le faire aussi »

En janvier, les oiseaux recommencent à chanter après s’être tus tout l’automne et au début de l’hiver. Perchée au sommet d’un arbre, la grive draine (Turdus viscivorus) est au mieux de sa forme pendant une tempête de vent et de pluie ; elle chante joyeusement pendant plusieurs minutes, s’arrête, puis recommence. En raison de cette habitude qu’elle a de chanter avant et pendant l’orage, la Grive draine est souvent appelée  “Stormcock” (queue de tempête), le nom de Grive draine étant une allusion aux baies de gui (drainantes) qui constituent, dit-on, sa nourriture favorite. C’est la plus grande de toutes les grives britanniques et, en automne, on peut l’observer en petits groupes de dix ou vingt individus. En janvier, ces volées se dispersent et les oiseaux s’accouplent. Le Rouge-gorge (Erythaca rubecula) est un chanteur d’hiver, mais en réalité, ce petit oiseau joyeux chante toute l’année, à l’exception de sa période de mue estivale. « Le rouge-gorge, sacré pour les dieux du foyer », est largement répandu et fait l’objet d’un modèle universel. Son nom scientifique vient d’une confusion entre le latin Erythaca et le grec ἑρυθρός, qui signifie « rouge ». Les légendes expliquant cette poitrine rouge sont variées. L’une d’elles décrit comment, alors que Jésus-Christ était suspendu sur la croix du Calvaire, l’oiseau s’efforça de toutes ses petites forces d’arracher les épines de son front, perçant sa douce poitrine et la souillant de sang. « Béni sois-tu, dit le Seigneur, tu participes à mes souffrances. Partout où tu iras, le bonheur et la joie te suivront ; tes œufs seront bleus comme le ciel, et tu seras désormais l’oiseau de Dieu, le porteur de bonnes nouvelles. » (The Curious Book of Birds de Abbie Farwell Brown) [1] Une tradition galloise donne une origine différente ; la poitrine aurait été brûlée par le feu alors que le petit Rouge-gorge (aussi appelé Robin) portait de l’eau, goutte après goutte, aux âmes du purgatoire.

« Dans son petit bec, il apporte une goutte de rosée,
Et la laisse tomber sur les âmes du péché,
Voyez les marques sur sa poitrine rouge laissées
Par les feux qui brûlent quand il la laisse tomber. »

Une vieille croyance veut que « le Rouge-gorge, s’il trouve un homme ou une femme morts, lui couvre le visage de mousse ; et certains pensent que si le corps reste sans sépulture, il le couvrira entièrement ». Chaque enfant, à qui on a lu “Babes in the Wood”, sait que

« Le pieux Rouge-gorge
Les a couverts de feuilles ».

et Shakespeare fait allusion à cette croyance dans Cymbeline.

« C’est avec les plus belles fleurs
que, tant que durera l’été et que je vivrai ici, je veux, Fidèle,
embaumer ta triste tombe. Je ne manquerai pas de t’apporter
la fleur qui est pareille à ton visage, la pâle primevère, et
la clochette azurée comme tes veines, et
la feuille de l’églantier qui, sans médisance,
est moins parfumée que ton haleine : à mon défaut, le rouge-gorge,
dans son bec charitable (ô petit bec, comme tu fais honte
à ces riches héritiers qui laissent leur père couché
sans monument !) t’apporterait tout cela.
Oui, et quand il n’y a plus de fleurs, il mettrait sur ton corps une fourrure de mousse
comme vêtement d’hiver. »

[Arviragus dans Cymbeline, Acte IV, Sc. II. traduction de François-Victor Hugo]

Drayton et Webster y font également référence, ce dernier associant le Troglodyte à l’acte de miséricorde, et nous savons que

« Le Rouge-gorge et le Troglodyte
Sont le coq et la poule de Dieu tout-puissant ».

Le Troglodyte* (Troglodytes europæus, parvulus, ou vulgaris) est le seul membre de sa famille en Europe. C’est un petit oiseau très timide, avec une faible capacité de vol, mais sa voix, malgré sa taille, est claire et puissante ; c’est aussi un chanteur d’hiver. Comme les merles, les troglodytes conservent leurs lieux d’origine, à tel point que Hudson affirme : « Il existe un Troglodyte des Cornouailles, comme il existe un Troglodyte de St Kilda, et comme il existe un Troglodyte autochtone ou une race locale de Troglodytes parvulus dans chaque comté, chaque village, chaque ferme, chaque bois, chaque taillis et chaque haie du Royaume-Uni. C’est un petit oiseau casanier, et lorsque vous le trouvez, été comme hiver, en ville ou à la campagne, vous savez qu’il est natif du lieu, que sa famille est très ancienne dans cette région, et qu’elle s’y est probablement installée avant l’avènement de l’homme aux yeux bleus et l’aube de l’âge de bronze. »

La façon dont ce Roitelet est devenu le roi des oiseaux est racontée dans les contes populaires de Grimms. À ce propos, nous notons que le sport cruel de la « chasse au Roitelet » était pratiqué à diverses dates dans différentes localités ; dans le sud de l’Irlande, Noël ou la Saint-Étienne était le moment choisi, mais l’origine de cette curieuse coutume est inconnue. Timbs, dans son ouvrage Something for Everybody, dit à ce sujet : « Son origine est ainsi retracée par Aubrey dans ses Miscellanies : la dernière bataille livrée dans le nord de l’Irlande, entre les protestants et les catholiques, s’est déroulée à Glinsuly, près de Letterkenny, dans le comté de Donegal. Tout près de là, un groupe de protestants endormis avait été surpris par les irlandais papistes, si ce n’est que plusieurs roitelets les avaient réveillés en dansant et en picorant sur les tambours à l’approche de l’ennemi. C’est pour cette raison que les féroces Irlandais haïssent mortellement ces oiseaux encore aujourd’hui, les appelant les serviteurs du Diable, et les tuant où qu’ils les attrapent ; ils apprennent à leurs enfants à les coincer dans les ronces : vous verrez parfois, les jours de fête, toute une paroisse courir, comme des fous, de haie en haie, à la chasse aux roitelets. » [2]

Selon certaines autorités, l’antipathie des Irlandais envers le Roitelet est liée à l’invasion des Danois. Une autre explication est que les Druides le considéraient comme le roi des oiseaux, et qu’il était l’oiseau préféré des augures d’autrefois. Le respect superstitieux qui lui était ainsi accordé a offensé, dit-on, « nos premiers missionnaires chrétiens, et sur leur ordre, le Roitelet est encore chassé et tué par les paysans le jour de Noël ; et le jour suivant (à la Saint-Étienne), il est transporté, suspendu par la jambe au centre de deux cerceaux se croisant à angle droit ; et une procession est faite dans chaque village, composée d’hommes, de femmes et d’enfants, chantant une chanson irlandaise, le considérant comme le roi de tous les oiseaux. » (Collectanea de Rebus Hibernicus de la Col. Vallencey). Timbs présente d’ailleurs une chanson qui commence ainsi

« Le Roitelet, le Roitelet,
Le roi de tous les oiseaux,
Le jour de la Saint-Étienne,
Il a été pris dans les fourrés. »

Mais l’origine suggérée par cette dernière explication ne semble pas très probable.

On peut maintenant entendre l’Accenteur mouchet, la Mésange charbonnière, la Grive, le Pinson et le Merle noir. Les Corbeaux retournent à leurs nids et l’on peut voir des volées d’Alouettes, de Linottes et de Bruants. La Sittelle (Sitta cæsia) s’approche de nos maisons à la recherche de nourriture, elle coince des escargots, des glands ou des graines dans les fissures des arbres avant de les marteler avec son bec solide afin de les briser. Elle se nourrit aussi de gros insectes qu’elle trouve en parcourant et soulevant l’écorce des arbres. Alors que le Pic, dont le chant peut être entendu ce mois-ci, se déplace toujours en spirale sur un arbre, la Sittelle court librement dans toutes les directions avec un mouvement semblable à celui d’une souris. 

Dans les recoins abrités sous les haies, les jeunes feuilles poussent et les insectes pullulent ; les moucherons, en particulier, dansent gaiement dès que le temps est un tant soit peu doux.

Malgré les nuits glaciales, le mois de janvier est riche en fleurs : Ortie rouge et blanche, Séneçon doré, Ajonc, Pétasite, Mouron des oiseaux, Perce-neige, Tussilage et Hellébore fétide, Faux-fraisier (ou Potentille), Bourse-à-pasteur, peut-être Véronique des champs (Veronica agrestis) ou un Pissenlit, une Marguerite ou une Primevère égarés, surtout dans les vallées du Devon et des Cornouailles pour cette dernière. Dans le jardin, nous avons la Rose de Noël (Helleborus niger), l’Aconit d’hiver, la Daphné au parfum curieux, le Jasmin jaune, et peut-être une Fausse-Giroflée, une Grande Giroflée ou une Primevère.

La petite Ortie rouge est la première des fleurs de l’année, devançant le Perce-neige d’une semaine ou plus. Les feuilles du Lamier rouge (Lamium purpureum) et du Lamier blanc (L. album) ressemblent beaucoup à celles de l’ortie commune, d’où leur nom, mais on les distingue facilement par leurs fleurs, ainsi que par le fait que les orties ont des tiges carrées. Les plantes appartiennent à des ordres totalement différents, l’ortie est un membre de l’Urticaceæ, ses fleurs vertes sont disposées en longues grappes et elle est apparentée à l’Orme et au Houblon, tandis que les orties appartiennent au grand ordre des Labiées et sont apparentées aux diverses menthes, aux épilobes, aux germandrées, aux bugles, etc. Les Labiées sont facilement reconnaissables à leurs fleurs, qui sont généralement divisées en deux lèvres, dont la lèvre inférieure est plus grande et trilobée, et la supérieure moins nettement bilobée. Il s’agit d’une famille véritablement exemplaire, car si aucun de ses membres n’est nuisible, beaucoup sont très précieux en raison de leur huile volatile ; le Menthol et le Patchouli sont extraits de diverses espèces, et la Lavande, la Menthe poivrée, la Menthe pennyroyal et le Romarin sont bien connus en pharmacie. Le Révérend C. A. Johns, dans son ouvrage Flowers of the Field, nous dit que le dernier Romarin « est l’une des plantes utilisées dans la préparation de l’eau de Cologne et de l’eau de Hongrie, et que la saveur admirée du miel de Narbonne est attribuée aux abeilles qui se nourrissent des fleurs de cette plante, tout comme la saveur du miel d’Hymette est redevable au Thym sauvage », qui fait également partie des Labiacées.

Comme le Rouge-gorge, le Séneçon vulgaire (Senecio vulgaris) est un ami de toute l’année, car il n’y a pas un mois où nous ne trouvons pas ses petites fleurs jaunes. Ces fleurs et leurs feuilles représentent la nourriture préférée des petits oiseaux et, autrefois, le Sénéçon était réputé en médecine pour les cataplasmes. Le nom du genre vient du latin senex : vieillard, faisant allusion à sa pellicule blanche et velue.

La curieuse Pétasite officinale (Petasites officinalis), avec sa tête de fleurs en forme de massue, appartient au même genre que l’Héliotrope d’hiver (P. fragrans) de nos arbustes, et comme lui, c’est une mauvaise herbe très persistante, qui évince toutes les autres plantes dans son voisinage. Les fleurs apparaissent quelque temps avant les larges feuilles, de un à quatre pieds de diamètre, qui ont donné au genre son nom botanique, du grec πέτασος, parasol, et aussi son titre anglais, Butterbur ou Butterdock, le feuillage étant utilisé pour emballer le beurre. La ressemblance de ses feuilles avec celles d’un autre « dock », la Bardane, est très forte et, en été, on la confond souvent avec cette plante.

Le petit Mouron des oiseaux, ou Mouron blanc (Stellaria media), comme le Sénéçon, est l’aliment préféré des petits oiseaux, d’où son nom. Il existe trois espèces britanniques, dont le Mouron des oiseaux commun, qui est de loin le plus abondant et qui fleurit sur tous les bords de route. On a dit de cette plante qu’elle « a suivi le Britannique dans le monde entier ». Les autres espèces sont le Grand mouron (S. aquatica) qui, comme son nom scientifique l’indique, pousse dans les sols humides – il fleurit en été – et la Stellaire des bois (S. umbrosa).

Le magnifique petit Perce-neige (Galanthus nivalis) ne peut pas, à proprement parler, être compté parmi les fleurs sauvages, bien qu’on puisse le trouver dans les bois de l’ouest de l’Angleterre. Il semble qu’il ait été importé du continent par les différents ordres religieux, qui le cultivaient dans les jardins des abbayes et utilisaient ses fleurs neigeuses lors de l’office de purification de la Sainte Vierge (2 février). Une vieille légende raconte que les premiers Perce-neige ont poussé pour consoler Eve après qu’elle ait perdu le Paradis. Alors qu’elle pleurait au milieu de la neige épaisse, un ange s’approcha et, pour la consolert, attrapa et souffla sur un flocon qui tomba sur la terre sous forme de fleur. « Ce bourgeon, Eve, dit-il, est un gage que l’été n’est pas mort », et lorsque le visiteur angélique retourna au ciel, il lui dit

« Voici l’endroit où ses ailes ont balayé la neige,
Un anneau pittoresque du souffle du Perce-neige, blanc comme le lait. »

Et en effet, le Perce-neige, avec son message d’amour et de pureté divins, a réconforté et renforcé de nombreux cœurs tristes depuis ce jour. Les Français l’appellent, Perce-neige, les Allemands Schneeglöckchen, petite cloche de neige, les Espagnols Campanule blanche et les Gallois Clockmaben, Clochette.

Les fleurs suivantes, l’Hellébore vert, ou patte d’ours (Helleborus viridis) et l’Hellébore fétide (H. fætidus), se trouvent parfois dans des fourrés sur des sols calcaires, généralement près des maisons, mais ne peuvent être considérées comme indigènes. L’Hellébore fétide ou puant se distingue de l’Hellébore vert par l’extrémité violette de ses sépales. Un autre nom pour cette plante est Pied de Griffon.

La Bourse à pasteur (Bursa pastoris) se distingue facilement par les vaisseaux de graines en forme de cœur qui lui donnent son nom latin et anglais. Elle appartient à la famille des Crucifères ou des choux, tout comme la Giroflée, le Bouillon et divers Cressons. Les fleurs de cet ordre sont facilement reconnaissables à leurs quatre pétales, placés en croix. Il existe au moins 1200 espèces différentes de Cruciferæ, dont la plupart sont originaires des zones tempérées, bien que la végétation arctique en soit largement composée. Aucune n’est toxique, et la richesse en azote et en soufre qu’elles contiennent les rend inestimables en tant qu’aliments et médicaments. Les Navets, Radis et Choux marin cultivés sont de la même famille que l’humble petite Bourse à pasteur que l’on trouve au bord de la route.

La Potentille stérile ou Faux-fraisier (Potentilla fragariastrum) se distingue de la Fraise des bois, qui fleurit plus tard, par la pilosité de la face inférieure de ses feuilles et par ses pétales dentelés, ceux de la Fraise des bois étant entiers. Les deux plantes appartiennent aux Rosaceæ mais sont de genres différents.

Il est encore tôt pour les chatons, mais nous ne pouvons manquer de remarquer les « queues d’agneau » jaunes du noisetier, qui, rigides et vertes au cours des derniers mois, sont maintenant souples et mûres, secouant leur poussière poudreuse sur nos doigts lorsque nous en recueillons une gerbe. Le Noisetier est fertilisé par le vent, et non par les insectes, et donc, comme tous les arbres fertilisés par le vent, il doit produire une quantité considérable de pollen pour compenser les pertes. Les petites fleurs porteuses de graines sont moins visibles, mais elles sont belles avec leurs petits stigmates pourpres. Elles apparaissent un peu plus tard que les chatons mais on peut les trouver tous les deux avant la fin du mois.

Notes :

[1] Les œufs du Rouge-gorge sont de couleur blanchâtre, marqués de brun-rouge, mais ceux du Merle d’Amérique, Turdus migratorius, une espèce de Grive souvent appelée Rouge-gorge, sont bleus. Voir le Kéramos de Longfellow :

« Les œufs bleus dans le nid du Rouge-gorge
Auront bientôt des ailes, un bec et une poitrine,
et s’envoleront et voltigeront. »

[2] Popish Irish : la férocité dont par le l’auteur ici rappelle le complot papiste “Popish Plot” qui fut une conspiration fictive inventée par Titus Oates qui, entre 1678 et 1681, a saisi les royaumes d’Angleterre et d’Écosse dans une hystérie anti-catholique. Oates a allégué qu’il y avait une vaste conspiration catholique pour assassiner Charles II, des accusations qui ont mené aux exécutions d’au moins 22 hommes et ont précipité la crise du projet de loi d’exclusion. Finalement, le réseau complexe d’accusations d’Oates s’est effondré, ce qui a conduit à son arrestation et à sa condamnation pour parjure. (Source Wikipédia)

Notes supplémentaires de la traductrice : les noms de plantes et d’oiseaux, mais aussi d’insectes, sont différents en anglais et en français. C’est pour cela que nous nous référons généralement aux noms scientifiques, en latin. Ces noms latins représentent donc une référence universelle. Or, au quotidien, la vulgarisation des noms de certaines espèces qui se ressemblent, induit parfois en erreur. C’est le cas par exemple pour certains passereaux comme le Rouge-gorge et le Merle rouge, ou bien le Roitelet et le Troglodyte mignon. C’est d’ailleurs le cas dans cet article, les gens confondant parfois ces derniers lors de leurs célébrations du « roi des oiseaux » par exemple ; il ne faut donc pas se formaliser de l’utilisation ici des termes de Troglodyte et de Roitelet pour ce qui semblerait être le même animal.

De plus, l’équipe de traduction a fait le choix, pour l’ensemble de l’ouvrage, de franciser le texte en utilisant parfois des dictons français plus accessibles à la mémoire collective des lecteurs français.

Version française de l’article publié par Charlotte Mason Poetry avec leur autorisation. (Traduction ©2021 Charlotte Roman, révisions et relecture Maeva Dauplay)

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