Dans le dernier épisode, nous avons survolé les vingts principes de la philosophie Charlotte Mason parce que nous croyons qu’il était important de bien comprendre la base sur laquelle toute la philosophie s’appuie. Nous vous avons exposé comment ils s’influencent les uns les autres et travaillent ensemble pour créer une atmosphère éducative respectueuse de l’enfant et aide à maintenir un amour de l’apprentissage pour l’adulte en devenir. Dans cet épisode, nous allons aborder le rôle de l’enseignant et l’expliquer à la lumière des écrits de Mlle Mason. 

Bonne écoute !

CITATIONS

« Notre erreur. Notre erreur mortelle est de supposer que nous sommes son showman de l’univers; et non seulement cela, mais qu’il n’y a pas du tout de communauté entre l’enfant et l’univers, à part celle que nous décidons d’installer. Nous sommes sa communauté, et si nous décidons que l’éducation des enfants du village sera limitée aux matières de base, de quel droit pourraient-ils demander plus? Si la vie est pour lui de passer son samedi soir à la brasserie, ce n’est sûrement pas de notre faute! Si nos propres garçons vont à l’école et à l’université et sortent sans avoir d’intérêts, sans lien avec les choses qui valent la peine, nous ne sommes pas sûrs que ce soit de notre faute non plus. Nous n’apprécions pas qu’ils soient qualifiés d’abrutis parce que nous savons qu’ils sont de bons garçons. Voilà ce qu’ils sont, des petites merveilles à l’état brut qui n’ont pas été formées! »

Mason, C. School Education, p.188

« Laisser-agir magistral – Nous sommes mentalement constitués de sorte que lorsque nous recevons une idée, elle se manifestera en pensée ou en action sans grand effort de notre part; et, si nous reconnaissons la notion de laisser-agir magistral dans l’éducation, nous encadrerons nos interactions avec les enfants avec cette notion en tête sans vraiment y porter attention. Mais nous devons définir clairement ce que nous entendons par « laisser-agir magistral ». Cette joyeuse expression de Carlyle (NDLT: Thomas Carlyle, de qui CM a pris l’expression en 1881) n’a rien en commun avec l’attitude de laisser-aller qui vient avec la pensée « à quoi bon? » et encore moins avec la pure nonchalance d’esprit qui laisse les choses aller sans prendre la peine de les guider. Cette expression démontre une saine attitude morale qui nous est utile d’analyser. Peut-être cette idée est celle véhiculée par l’expression encore plus heureuse de Wordsworth: sage passivité. Ces expressions démontrent le pouvoir d’agir, le désir d’agir et la perspicacité et contrôle de soi qui empêchent toute action. Mais il y a une autre idée véhiculée par le laisser-agir magistral, du moins, de notre point de vue. La maîtrise n’est pas seulement sur nous-mêmes; nos enfants devraient également être conscients d’un sens de l’autorité lorsqu’il est inactif autant que lorsqu’ils font ce que nous demandons d’eux. Ce sens de l’autorité est la condition nécessaire à la relation parentale, et je ne suis pas certaine que sans cela nos activités ou notre inactivité produiront de grands résultats. La force de cet élément est la colonne vertébrale de notre position. « Nous pourrions… si nous voulions » et les enfants le savent. Ils sont libres sous l’autorité, c’est ça la liberté; être libre sans autorité est une licence. » 

Mason, C. School Education, p.28-29

« Si de simples sensations peuvent nous apporter autant de joie, de rafraîchissement mental et de bien-être physique, à la fois quand on les expérimente et plus tard, quand on se les rappelle d’innombrables fois, il est donc logique qu’une grande partie de notre travail en tant qu’éducateur est de préserver l’acuité des perceptions des enfants et de remplir leurs souvenirs d’images de grande joie. » 

Mason, C. Parents and Children. p. 194

« Il est vrai que vous pouvez mener un cheval à l’eau mais vous ne pouvez le forcer à boire. Le problème est que nous n’amenons même pas le ‘cheval’ à l’eau. Nous lui donnons de pathétiques petits manuels scolaires qui ne sont que des survols de faits arides, et ensuite, nous nous attendons à ce que l’étudiant les mémorises et les recrache lorsque vient le temps de l’évaluation. Ou alors, nous lui donnons des faits de toute sorte dilués dans des discours préparés par son enseignant et qui pourraient contenir encore une ou deux étincelles d’idées vivantes cachées quelque part dans ce mélange. Pourtant, pendant tout ce temps, nous avons accès à un trésor de livres qui fourmillent d’idées fraîches sorties de l’esprit de brillants penseurs et ce, dans chaque matière que nous souhaiterions présenter aux enfants. »

Mason, C. School Education, p.171

« Nous reconnaissons que la grande oeuvre de l’éducation est d’inspirer des idées enlevantes aux enfants et ce, dans chaque sphère de sa vie, dans chaque catégorie de connaissance, chaque sujet auquel on puisse penser, et d’intentionnellement aider les enfants à développer de bonnes habitudes de vie qui viennent d’idées inspirantes. Nous pouvons compter sur la promesse de l’aide du Saint-Esprit dans la réalisation de cette importante tâche. Nous reconnaissons Son Esprit dans un sens qui est nouveau dans notre façon de penser moderne–nous Le reconnaissons comme étant l’Éducateur suprême, enseignant à l’humanité des choses que l’homme a étiqueté laïque, tout comme les choses considérées comme étant religieuses. » 

Mason, C. School Education, p.173

« Comme nous avons eu l’occasion de vous l’affirmer précédemment, les parents et les enseignants ne peuvent jouer qu’un rôle de subordonné dans ce grand travail qu’est l’éducation. Après tout, vous pouvez mener un cheval à l’eau mais vous ne pouvez le forcer à boire; de la même façon, vous pouvez présenter les meilleurs idées aux enfants mais vous ne pouvez prédire quelles idées l’accrocheront et lesquelles il rejettera. Et c’est tant mieux pour nous que l’enfant ait ce gage de sureté de son individualité en son for intérieur. Notre rôle est de voir à ce que son assiette éducative soit constamment remplie d’idées adéquates et inspirantes et ensuite nous devons laisser l’appétit de l’enfant réguler ce qu’il prendra et en quelle quantité, selon ses besoins. Nous devons porter attention au moindre signe de satiété, surtout lorsque nous présentons des idées d’ordre moral ou religieux. Si nous persévérons malgré ces signaux de satiété, l’enfant pourrait ne plus vouloir se rasseoir devant ce plat. »

Mason, C. Parents and Children, p. 127

« La plupart des règles de Dieu pour l’éducation des enfants sont formulées à la négative: ne les méprisez pas, ne les entravez pas, ne les offensez pas avec des actions maladroites et rudes ou par manque d’égards. La seule règle positive est de ‘nourrir’ (qui devrait être rendu par paître) ‘mes brebis’. Nous devons les placer au milieu de provisions abondantes de nourriture. » 

Mason, C., Towards a Philosophy of Education, p. 81.

« Ceci devrait être la clé de la mère pour l’éducation de chaque garçon ou fille. Je ne veux pas dire ses enfants, de façon collective, parce que le Saint-Esprit ne travaille pas avec des noms pluriel. Il travaille avec chaque enfant individuel. Il est infini, et donc même le monde entier n’est pas une école trop grande pour cet Enseignant infatigable. Et puisqu’Il est infini, Il est en mesure de nous donner toute Son attention infinie à chacun de Ses nombreux élèves. Nous ne nous réjouissons pas suffisamment de cette richesse abondante que nous donne la nature infinie de Dieu. »

Mason. C., Parents and Children, p. 273

LA GRANDE PRISE DE CONSCIENCE DE CHARLOTTE MASON

Miss Mason réfère à cette notion du Saint-Esprit, enseignant suprême, comme étant sa grande prise de conscience. Lors d’un voyage en Italie, elle lisait le livre Morning in Florence de John Ruskin et dans ce livre, l’auteur imagine le lecteur marchant avec lui dans les rues de Florence et découvrant l’art autour de lui et c’est ce qu’elle a fait. Elle est allée à la chapelle espagnole attachée à l’église Santa Maria Novella et lisait ce que Ruskin disait à propos de cette fresque appelée «La descente du Saint-Esprit». Dans cette fresque, nous pouvons voir dans la portion supérieure le Saint-Esprit, représenté par une colombe, qui descend et passe à travers différentes couches représentant premièrement des vertus cardinales dont la Foi, l’Espérance et l’Amour, et ensuite, les apôtres. En-dessous, étonnamment, et c’est ce qui est la grande prise de conscience de Charlotte Mason, viennent les sept sciences naturelles. Nous y retrouvons une image de la Grammaire, représentée de façon allégorique, accompagnée d’écoliers avec Priscien, la Rhétorique et Cicéron en habit romain, la Philosophie et Aristote, la Musique était représentée par Toubal-Caïn, l’Astronomie et Ptolémée, la Géométrie et Euclide et l’Arithmétique et Pythagore, etc. 

« Mais la grande prise de conscience que nous devons faire est de réaliser que Dieu, le Saint-Esprit, est personnellement Celui qui transmet la connaissance. Il est Celui qui instruit notre jeunesse. Il inspire le génie. Ce concept est si perdu pour nous que nous croyons qu’il est irrévérencieux d’imaginer que le Saint-Esprit coopère avec nous lorsque nous enseignons des notions laïques telles que l’arithmétique. Mais les Florentins, au Moyen-Âge, sont même allés au-delà de cette affirmation. Ils croyaient que non seulement les sept Arts libéraux étaient sous l’influence directe du Saint-Esprit mais également que toute idée productive, tout concept original, que l’on parle d’Euclide, de la grammaire ou de la musique, était une inspiration directe du Saint-Esprit et ce, sans égard pour le fait que la personne ayant choisi de disséminer son idée au monde affirme être chrétienne ou qu’elle ait même reconnu d’où venait son inspiration.»  

Parents and Children, p. 270-71

Et donc, elle affirmait qu’il n’existe aucune connaissance dite laïque ou religieuse parce que le Saint-Esprit donnait toutes les idées à tout le monde et ce, peu importe si la personne était croyante ou qu’elle reconnaissait qu’Il était celui qui donnait l’inspiration. L’application pratique pour sa méthode est que le Saint-Esprit enseigne directement à chaque individu et que nous coopérons avec Lui mais qu’au final, il est l’Enseignant ultime.


LIENS

Pour voir la fresque en plus de détails, cliquez ici. Le site est en anglais mais les images n’ont pas besoin d’explications.

Pour l’ensemble des épisodes, nous tenons à remercier les animatrices du podcast anglophone A Delectable Education, Emily, Liz et Nicole, qui nous ont généreusement permis de les copier!