Note de la traductrice : Hilda Eleanor Breckels nous présente l’organisation de son école maternelle. Elle y parle du jeu libre et de ses bienfaits. Le lien parents – enfants – école y est central et elle nous partage ce qui est mis en place pour une meilleure intégration des parents. Elle nous partage aussi la posture adoptée par les enseignants lors des jeux et des activités quotidiennes.

Par Hilda Eleanor Breckels
The Parents’ Review, 1969, p. 21-23

Je vais vous dire comment j’applique les principes du PNEU (Parents’ National Educational Union) aux routines de notre école maternelle.

L’aspect le plus significatif de notre travail est notre étroite coopération quotidienne entre parents, enfants et enseignants. Charlotte Mason a été l’une des premières à réaliser pleinement combien l’école a besoin d’une relation étroite avec les parents de ses élèves. Je suis convaincue qu’elle conviendrait que cette association est encore plus importante pour nos enfants de moins de cinq ans qui fréquentent les écoles maternelles.

En effet, la phase d’apprentissage la plus influente se situe entre la naissance et la cinquième année, de même que le moment où les liens intimes entre la mère et l’enfant sont les plus nécessaires au développement général et à l’adaptation à la vie.

Par conséquent, nous accordons la priorité à la promotion d’une association étroite entre parents, enfants et éducation. Il existe de nombreuses autres associations favorables au développement des enfants que nous sommes tenus de sauvegarder et d’enrichir, mais lorsque la trinité prospère, toutes les autres associations ont une meilleure chance.

Les cinq premières années d’apprentissage étant les plus influentes de la vie d’un enfant, il s’ensuit que c’est au cours de cette phase que les parents ont le plus besoin d’aide pour comprendre la vérité sur le fonctionnement du cerveau et les principes d’enseignement du PNEU.

Là encore, c’est aussi au cours des cinq premières années d’un enfant que les parents recherchent des signes d’intelligence qui permettront à leur enfant de réussir à l’école et dans le monde rude de la compétition. Du stress et des angoisses tenaces les poussent souvent à comparer un enfant à un autre et à forcer le rythme des apprentissages. Les doutes, les tensions et les antagonismes surgissent entre les parents et l’enfant. Ce conflit ne survient pas lorsque les parents comprennent la vérité sur le comportement de leur cerveau, car ils réalisent alors que l’éducabilité de leur enfant est énormément plus grande qu’ils ne l’avaient supposé jusqu’alors.

Nous aidons nos parents à comprendre tout ça en les accueillant les quarante premières minutes de chaque matin. C’est notre période de jeu libre, pendant laquelle nous conseillons aux parents de se mêler à toutes les exigences de comportement, aux aventures physiques sur nos équipements et aux nombreuses sortes de jeux créatifs. Cela donne aux parents un aperçu de notre philosophie et de nos objectifs, en plus d’aider leurs propres enfants à associer cette nouvelle vie en communauté avec la maison, la mère et le père.

C’est à ce moment que nous expliquons, discutons et démontrons nos méthodes, lorsque nous attirons l’attention sur les réactions et les réponses des enfants qui impliquent des progrès dans les compétences sociales, la capacité créative, l’ingéniosité, l’élocution, etc.

De plus, pendant le jeu libre, nous coopérons avec les parents pour résoudre les problèmes d’adaptation. La plupart des matins nous en fournissent un ou deux. Nous les traitons immédiatement avec eux. Les problèmes d’adaptation des moins de 5 ans ne peuvent pas attendre.

Le temps de jeu libre et ouvert est suffisant pour aider la plupart des parents à comprendre nos méthodes. Il y en a cependant quelques-uns qui ont besoin d’encore plus de démonstrations donnant des résultats perceptibles. Nous faisons en sorte que ceux-ci restent pendant toute une matinée. Cela réussit généralement.

Autre conséquence du jeu libre : dès que c’est fini et que tout est rangé, avec l’aide des enfants, ils se séparent volontairement dans leurs tranches d’âge et courent pêle-mêle à leurs places de groupe, heureux d’avoir pu profiter du jeu libre du matin. Le jeu libre les a fatigués. Chaque enfant a été livré à lui-même. Il a dû se décider sur tout : avec qui jouer, ou quel groupe rejoindre, quel équipement de jeu choisir, faut-il oser une grande aventure sur une structure, ou encore faut-il oser frapper à la porte du théâtre pour voir ce qui se passe à l’intérieur.

Finalement, tous sont fatigués de s’être occupés de manière créative et de s’être débrouillés seuls. Les enfants sont également fatigués les uns des autres, et ont besoin d’un adulte réconfortant avec une voix gentille pour tout dire sur les choses à faire. L’étroite compagnie des adultes répond à leur besoin de calme et de bien-être. 

Ceci est particulièrement vrai en ce qui concerne le langage. Cela nécessite un accompagnement fréquent dans les premières années que les moins de cinq ans ne peuvent pas obtenir lorsqu’ils sont avec des enfants du même âge. Pour améliorer leur langage, les enfants de moins de 5 ans doivent souvent être avec des adultes aimables et capables de converser avec les très jeunes. J’aurai plus à dire à ce sujet dans une minute.

Je dois maintenant vous parler de notre temps calme, car il suit tout ce jeu bruyant. Certains matins, nous chantons un cantique et disons des prières. D’autres, nous associons Dieu aux relations humaines, ou aux saisons et autres aspects de la nature. Nous racontons également des histoires de Jésus, Marie et Joseph et des bébés, des garçons et des filles de l’Ancien Testament. Nous apprenons à nous taire. Respectueux.

Ainsi sont-ils revenus au calme. Ils sont désormais avides d’activités de groupe pendant qu’ils seront aux petits soins d’adultes qui leur disent quoi faire et comment le faire. Tout en disant soigneusement et explicitement aux enfants qui écoutent ce qu’ils doivent faire, les enseignants du groupe donnent cet élan important à la parole. En plus d’être du temps de formation pour développer le langage, ces activités en petits groupes sont autant de petits pas vers les préliminaires à la lecture, vers la construction de mots et vers les nombres.

Tout cela se fait par le jeu. Les connaissances sont en quelque sorte enfilées à travers un jeu, au moyen de supports pédagogiques appropriés. Si les enfants sont prêts, ils apprendront la petite leçon. S’ils ne le sont pas, ils apprécient simplement le jeu. Ils font généralement les deux.

Étant une école maternelle du PNEU, nous ne faisons rien de plus qu’aider les enfants à jouer aux jeux. Nous laissons tout le reste aux pouvoirs d’attention, d’imagination, de réflexion, de jugement, etc., des enfants. Nous ne posons aucune question, ne donnons aucun éloge ou blâme, ne faisons aucune comparaison. Les enfants ne savent pas lequel d’entre eux est au-dessus de la moyenne, lequel est un peu lent. Nous sommes une société sans classes. Nous apprenons avec facilité et éclat.

Outre les routines quotidiennes que j’ai mentionnées jusqu’à présent, nous avons une dose quotidienne de musique. Nous avons le chant, la musique, le mouvement et les percussions. Je n’ose pas commencer à parler de l’appréciation musicale. Je risque de ne jamais m’arrêter ! Mais je dois dire ceci : nos cours de musique stimulent tellement qu’ils améliorent grandement le langage. C’est le post-bavardage !

Il en va de même pour la création d’images libres. Un groupe d’enfants occupé à faire des images avec des peintures ou des crayons non toxiques de Chubbies, ne cesse jamais de babiller ! La même chose à l’heure du lait et des biscuits. Dans chaque cas, les adultes en charge se joignent à eux et ajoutent des mots et des connaissances plus générales aux mémoires de ces moins de cinq ans.

Avec le temps, disons entre quatre ans et demi et la cinquième année, et pendant les périodes de lecture d’histoires, toute cette formation à la parole passe tout naturellement à la narration.

Il y a plus à dire, bien sûr, mais j’espère en avoir assez dit pour vous convaincre qu’une école maternelle travaillant sur la philosophie et les principes du PNEU est de première classe !

Article original sur Ambleside Online. (Traduction ©2021 Celine Garcia. Relecture et révisions Maeva Dauplay)

Ecouter le podcast